Il y a un peu plus de 20 ans, naissait un texte qui a posé nombre de bases de l'avènement du web 2.0: TAZ d'Hakim Bey. Ce texte anarchique frôlait avec la notion de zone d'autonomie temporaire sans jamais les définir. Basées sur le concept des utopies pirates, ces zones sont, en quelque sorte, des regroupements nomades dans l'espace et le temps capables d'une grande adaptation et de circonvenir rapidement à toute velléité de contrôle.

« Si la TAZ est un campement nomade, alors le Web est le pourvoyeur des chants épiques, des généalogies et des légendes de la tribu ; il a en mémoire les routes secrètes des caravanes et les chemins d'embuscade qui assurent la fluidité de l'économie tribale ; il contient même certaines des routes à suivre et certains rêves qui seront vécus comme autant de signes et d'augures »

Les premiers artisans du web grand public (il n'est donc pas ici question de la mise en place des structures de réseaux de type militaire ayant participé à la naissance du web) y ont vu un espace totalement libertaire permettant de s'affranchir des notions d'espaces, de pays et de temps. Ces artisans ont été fortement influencés par nombre de texte dont notamment TAZ en 1984. De par la nature de ces artisans, de leurs lectures, de leurs cultures de manière générale, bien des idées se sont vues intégrées au schème global de ces aspects libertaire au sens ontologique du terme. Un espace hors de tout contrôle et hors de toute censure où n'importe quelle idée peut être non seulement diffusée mais aussi perdurer au-delà de son auteur dans les chemins perdus des adresses électroniques.

Vingt ans plus tard, l'expression de web 2.0 était utilisée pour définir non seulement cette conscience de l'espace libertaire mais aussi une plus grande facilité d'utilisation par la masse. La démocratisation générale du web.

Le web devenait un espace de liberté pour tous ceux qui pouvait y avoir accès.

Et les internautes (j'ai toujours beaucoup aimé l'étymologie de ce mot: les navigateurs de l'internet) sont extrêmement attachés à ce qui est ni plus ni moins qu'une forme romantique anarchiste. Et notamment aux TAZ, sans forcément les définir.

Nos différentes blogosphères sont des TAZ, des regroupements de personnes partageant de l'information. Je ne dévierai pas ici sur l'aspect profondément mégalomaniaque définissant le blogueur. En effet, le blogueur (je m'inclus bien évidemment) n'est-il pas un être donnant son avis sur tout et rien et si convaincu que cet avis est intéressant qu'il le partage avec d'autres ? Auto centrée, la blogosphère conforte chacun dans ce bon droit vu qu'il est essentiellement lu (et surtout commenté) par d'autres blogueurs tout aussi convaincus de leur bon droit à donner un avis ?

J'ai finalement digressé. Je reviens donc à mon point initial, l'attachement que nous avons à notre espace de liberté. L'attachement que nous avons à notre droit à la "propriété libre" (ontologiquement antithétique bien entendu) en tant qu'individus.

De par tout ces faits et de par la formidable énergie déployée par les artisans du web mais aussi par les internautes, je trouve profondément amusant qu'il y ait encore des pulsions liberticides de la part des instances de contrôle que sont les gouvernements, de la mise en place de lois anti-piratage au flicage de nos petites habitudes. N'est-il pas amusant de constater que ces efforts fournis par les gouvernements sont à ce point vide de sens ? En effet, il est écrit que, par définition, toute instance de contrôle se fera contourner dans un délai relativement court. Les exemples sont partout autour de nous, du craquage des logiciels au craquage de l'Iphone et des consoles.

Le web est une structure autonome qu'il est impossible de contrôler par essence. De par la philosophie qui a présidé à sa conception, c'est un espace fluctuant et mutable.

Du coup, à quoi bon crier au scandale pour une loi qui se rendra d'elle-même caduque à sa naissance ? De nouveaux modèles de téléchargements, de nouvelles façons de passer au travers des mailles du filet, de nouveaux contournements seront trouvés.

Et surtout, de nouveaux chemins seront créés.

Comme une pression sélective de type darwinienne s'exerçant pour améliorer encore le système.

Tout ceci, n'est bien sûr qu'une vision personnelle de la chose; mais, comme je suis un blogueur, je me sens obligé de le soumettre à votre attention ^^

Humeur :

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